Méditation pour le 23ème dimanche ordinaire, 8 Septembre 2024
« Écoutez donc, mes frères bien-aimés ! Dieu, lui n’a-t-il pas choisi ceux qui sont pauvres aux
yeux du monde pour en faire des riches dans la foi, et des héritiers du Royaume promis par
lui à ceux qui l’auront aimé ? »
Lettre de saint Jacques 2 , 1-5
Les clichés à la mode ne doivent pas devenir la règle d’évaluation de la vie en Église. Déjà,
le prophète Isaïe (1 ère lecture) vient décaler nos préjugés. Aujourd’hui, certains voient
d’abord dans les religions des acteurs de violence ; en réponse, des chrétiens sont tentés
d’utiliser aussi la violence, dans les mots voire dans les actes. Commençons donc par
écouter le prophète : il évoque la vengeance et même la « revanche de Dieu », mais avec
des précisions paradoxales : « il vient lui-même et va vous sauver. » Comment ? Il ouvre les
yeux des aveugles et les oreilles des sourds, tandis que le boiteux va bondir comme un
cerf… En fait de revanche, il s’agit d’un secours apporté aux plus faibles, à ceux qui
souffrent de handicaps. Et les miracles de Jésus vont justement réaliser ce qui était
annoncé par le prophète. Quand le Père du ciel envoie son Fils en notre monde, ce n’est
pas pour semer la terreur ; tout au contraire, il guérit ceux qui souffrent, il manifeste une
force de vie qui profite en priorité aux plus fragiles.
Il est bon de méditer le récit évangélique qui nous éduque en ce dimanche. Cela se passe
en une région païenne, comportant des villes administrées directement par l’empire
romain. Et rien n’est dit concernant la religion de celui qu’on amène à Jésus, on précise
simplement qu’il est sourd ! Et Jésus s’implique corporellement à son égard : il met les
doigts dans ses oreilles et avec sa salive lui touche la langue ; ces gestes d’intimité
s’accompagnent d’un mot en araméen, la langue commune : Effata ! « Ouvre-toi ! ». Il sauve
cet homme de son enfermement afin qu’il puisse communiquer avec ses semblables. Ainsi
se réalise l’annonce du prophète, Jésus accomplit la mission reçue du Père en faisant
entendre les sourds et parler les muets. La « revanche de Dieu » n’a donc rien à voir avec
un déferlement de violence ; tout au contraire, l’action divine se manifeste comme une
œuvre de salut qui épanouit la vie.
Nous pouvons accueillir cette action salvifique en l’interprétant d’un point de vue
symbolique : alors que le péché nous referme sur nous-mêmes, induisant une peur qui
empoisonne les relations avec les semblables et la nature, la grâce du Seigneur vient
ouvrir nos capacités à faire le bien, à partager un amour qui donne à vivre. Notre légitime
quête du bonheur, dans le sens d’une vie dense et bienfaisante, n’a rien à voir avec un culte
du « moi », avec la construction d’une image artificielle de soi qui conduit à l’enfermement
et à l’ignorance du don mutuel qui réjouit, de la gratuité qui promeut la vie.
La parole de Jacques (2 ème lecture) questionne la communauté chrétienne quand elle reflète
une vie sociale fort ambiguë qui honore les puissants et méprise les faibles. Cet
enseignement vaut pour nous aujourd’hui. Nous nous rappelons que Jésus accomplit sa
mission en se tournant d’abord vers ceux qui sont laissés de côté. L’appel à une fraternité
qui ne se paie pas de mots ouvre à une vraie libération, tant de ceux qui se trouvent
marginalisés que de ceux qui s’enferment sur leurs richesses et leur statut social.
Accueillons donc la bonne nouvelle de l’Évangile : elle nous rend libres pour goûter la joie
d’un amour partagé. La grâce baptismale nous associe à l’amour trinitaire.