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Dieu et la science
Publié le 16 novembre 2021

Périodiquement, on assiste à une nouvelle offensive de partisans du « Dessein intelligent » (en anglais « intelligent design »), qui, sous des formes variées, conférences, articles, livres, bandes dessinées, vidéos, tentent de prouver l’existence de Dieu par des arguments qui se prétendent scientifiques.

L’un des derniers en date s’intitule : « Dieu, la science, les preuves », par Olivier Bonnassies et Michel-Yves Bolloré. Si ses motivations sont généreuses, la validité de son argumentation est discutable, et de ce fait risque finalement de desservir l’objectif recherché. Peut-on en effet se dispenser de l’acte de foi d’une part, et de la prise en compte du caractère toujours hypothétique de la méthodologie scientifique, d’autre part ?

Le sujet n’est pas nouveau, il remonte en fait à l’époque de l’émergence des sciences modernes au XVIIe siècle. La science nouvelle apparaissait alors à beaucoup comme susceptible de remettre en question la vision du monde traditionnelle établie sur l’interprétation littérale de la Bible. Quoi de plus naturel pour des esprits éclairés que de tenter de concilier ces deux modes d’approche, au risque d’une confusion des domaines – au profit, évidemment de la religion ? Et de s’emparer des nouvelles connaissances pour en tirer des « preuves » de l’existence de Dieu ?

Aujourd’hui, l’argumentation que l’on entend le plus fréquemment fait appel à l’idée intuitive que le monde tel que nous l’observons est trop complexe pour qu’il soit le fruit du hasard. D’où l’idée simple – simpliste ? – : il a bien fallu que « quelqu’un » de suprêmement puissant et intelligent se charge de réaliser, selon ses plans (son « dessein ») cette merveille d’organisation. C’est là le thème de la « Théologie naturelle » classique. Une variante plus moderne est que, pour que l’Univers soit susceptible de produire et de maintenir la vie tel que nous la connaissons (essentiellement la nôtre, bien entendu), il a fallu une conjonction extrêmement précise des valeurs de ce que les physiciens théoriciens appellent les « constantes fondamentales », par exemple constante de la gravitation, masse du proton et de l’électron, vitesse de la lumière, etc. D’où la conclusion que cette concordance, là encore, ne peut être le fruit du hasard, mais résulte d’un « ajustement » très précis (« fine tuning » pour les anglo-saxons). On voit tout de suite que, outre le fait que la notion de hasard n’est pas correctement analysée mais comprise seulement dans son acception la plus intuitive, le terme même d’ajustement suppose le problème résolu, puisqu’il renvoie nécessairement à un « ajusteur ».

Un dernier exemple de raisonnement, que j’ai découvert tout récemment, est celui-ci : la science nous a prouvé que l’univers a eu un commencement (le « Big Bang ») et aura une fin. Comment alors nous représenter ce qu’il y avait « avant », ce qu’il y aura « après », si ce n’est en supposant l’existence d’un Dieu ? Bien entendu, c’est faire dire à la cosmologie beaucoup plus qu’elle ne le souhaite, alors qu’elle se contente, beaucoup plus modestement, de poser  que, dans le modèle actuellement en vigueur, il est impossible de remonter en-deçà d’un certain instant « singulier », il y a quelque 13,8 milliards d’années, car les lois de la physique cessent d’y être utilisables. Quant au futur, il dépend entre autres de la structure géométrique de l’univers (sa « courbure »), sur laquelle les cosmologistes sont loin d’être d’accord.

On pourrait certainement trouver d’autres types d’exemples et de raisonnements allant dans ce sens. L’important, à me yeux, est de se rendre compte que, dans tous les cas, il s’agit d’inventer une explication pour des observations que l’on ne comprend pas complètement aujourd’hui. Et cette explication, c’est tout simplement un Dieu ! Mais quel est ce Dieu, que nous nous fabriquons afin de « boucher les trous » dans nos connaissances ? Au mieux, c’est le démiurge des anciens, l’artisan génial, le Grand Horloger de Voltaire !

Alors, ce Dieu dont on voudrait nous prouver l’existence par ce genre d’argumentation, a-t-il vraiment quelque chose de commun avec le Dieu Père, Fils et Esprit, créateur de toutes choses et source de tout amour, que nous, Chrétiens, avons appris à connaître et à aimer ? Est-ce bien celui qui, seul pourrait apporter une réponse à la question fondamentale de Leibniz : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » ? Il est vrai que cette question relève de la métaphysique, et non pas des sciences naturelles …

La science, pour l’avoir étudiée, pratiquée et enseignée durant de longues années, je sais ce qu’elle peut nous dire et nous apprendre. Dieu, en tant que catholique, je le connais et je crois en lui sur la base du témoignage des Apôtres transmis jusqu’à moi par l’Église. Tous les deux, chacun à sa manière, structurent mon être profond et ma façon de me rapporter à l’Univers, sans confusion ni opposition, mais bien au contraire de façon complémentaire.

La science et la foi en Dieu sont chacune un mode particulier de représentation du monde. Chacune jouit d’une parfaite légitimité, d’une complète autonomie, mais elles ne sauraient s’additionner, car elles appartiennent à des registres totalement différents, incommensurables pourrait-on dire. Dès lors, tenter d’instrumentaliser la première pour justifier la seconde (voire même l’inverse, ce qui arrive chez des tenants de fondamentalismes dans différentes religions), ne rend vraiment justice ni à l’une, ni à l’autre.

François Nau, 14 novembre 2021

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